Projet de loi portant interception de communications émises par voie électronique, interview du Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, M. Marou Amadou, Mardi 26 Mai 2020.

26:Mai

LE MINISTRE DE LA JUSTICE EXPLIQUE : partout ailleurs, la recherche de plus de sûreté se paie du sacrifice d’une part de liberté, et la volonté de conserver le maximum de libertés amène de son côté à renoncer à certains éléments de sécurité. Tout est alors question d’arbitrage et de choix politique : quelles libertés sommes-nous prêts à sacrifier pour être mieux protégés ? Quels dangers sommes-nous prêts à côtoyer pour garder le maximum de libertés d’action, de parole, etc. ? Dans un entretien exclusif accordé à L’Enquêteur, le Ministre de la Justice rassure par-rapport aux inquiétudes soulevées par le projet de loi portant interception de communications émises par voie électronique.

ENTRE LE DÉSIR DE LIBERTÉ ET LE DÉSIR DE SÉCURITÉ, NOUS SOMMES

CONTRAINTS DE CHOISIR ‘’, DÉCLARE MAROU AMADOU, MINISTRE DE LA JUSTICE

Partout ailleurs, la recherche de plus de sûreté se paie du sacrifice d’une part de liberté,et la volonté de conserver le maximum de libertés amène de son côté à renoncer à certains éléments de sécurité. Tout est alors question d’arbitrage et de choix Politique : quelles libertés sommes-nous prêts à sacrifier pour être mieux protégés ? Quels Dangers sommes-nous prêts à côtoyer pour garder le maximum de libertés d’action, de parole, etc. ?

Dans un entretien exclusif accordé à l’enquêteur, vendredi 22 Mai, le Ministre de la Justice rassure face aux inquiétudes soulevées par le projet de loi portant interception de communications émises par voie électronique.

Il ne se passe pas une semaine sans que des citoyens ne soient pas interpellés pour leurs opinions. Cette loi portant interception de certaines communications émises parvoie électronique n’est-elle pas une autre façon de renforcer la surveillance sur une frange de la population qui ne partage pas la pensée unique ?

Relativement aux interpellations que vous prétendez, vous êtes dans l’exagération. Et puis cette loi ne vise pas les citoyens ordinaires.

Il s’agit d’un projet de loi sur les interceptions de sécurité, qui existe dans les démocraties les plus avancées depuis de longues années pour une question de sécurité. A écouter les réactions de beaucoup d’acteurs politiques et de la société civile, j’ai pu comprendre qu’ils n’avaient pas lu le texte, ou, s’ils l’avaient lu, ne l’ont pas compris.

Cette agitation n’a pas lieu d’être :il s’agit d’un projet de loi et les partis qui sont représentés au Parlement sont libres de donner les directives qu’ils veulent à leurs députés pour d’éventuels amendements.

Il existe des tensions entre désir de liberté et désir de sécurité qui sont deux aspirations que l’on peut qualifier d’à la fois légitimes et difficilement compatibles. Entre les deux, nous sommes contraints de choisir. Ce projet de loi a été transmis à l’Assemblée nationale et son examen par la Commission saisie au fond a donné lieu à des amendements pertinents, à la satisfaction de tous. Il faut noter que les interceptions de communications émises par voie électronique ne peuvent être autorisées que pour la recherche de renseignements dans les cas suivants : atteinte à la sûreté de l’Etat et à l’unité nationale ; atteinte à la défense nationale et à l’intégrité territoriale; prévention et lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée; et prévention de toute forme d’ingérence étrangère et intelligence avec l’ennemi.  Pour une question de garde-fou, ces interceptions ne peuvent être autorisées, à titre exceptionnel,que par décision du Président de la République, sur proposition du Premier ministre,du Ministre en charge de la Défense,du Ministre en charge de l’Intérieur, du Ministre en charge de la Justice ou du Ministre en charge des Douanes, ou de la personne que chacun d’eux aura spécialement déléguée.

Il est important de savoir que tous les pays qui font face au terrorisme ont ce type de loi. Pour revendiquer une liberté, il faut être vivant.

Quelles assurances donnez-vous aux citoyens quant au respect des dispositions contenues dans le projet de loi ?

Pour veiller au respect de toutes les dispositions contenues dans ce projet de loi, éviter donc tout abus, il a été créé une Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), qui est une autorité administrative indépendante.

Toute décision d’interception de communication est communiquée dans un délai de

72 heures au plus tard au président de la CNCIS. Toutes les dispositions sont prises pour qu’une interception soit conforme à la loi. Si une interception ne l’est pas, la commission adresse au Premier ministre une recommandation tendant à ce que cette interception soit interrompue. S’il n’y a pas d’interruption, le président de la CNCIS saisit le Conseil d’Etat aux fins de faire constater l’illégalité de l’interception. Mieux, l’article 23, alinéa 1, du projet de loi en question dispose : « De sa propre initiative, ou sur réclamation de toute personne y ayant un intérêt direct et personnel, la commission peut procéder au contrôle de toute interception de sécurité en vue de vérifier si elle est effectuée dans le respect des dispositions de la présente loi ». Et l’auteur d’une réclamation est informé des résultats de la vérification. La CNCIS est par ailleurs composée d’un (1) magistrat de la Cour de cassation, désigné par le Président de la République, deux (2) députés, désignés par le Président de l’Assemblée nationale, un (1) magistrat du Conseil d’Etat, désigné par le Premier ministre, un (1) officier supérieur de la Police nationale, désigné par le ministre en charge de l’Intérieur, un (1) officier supérieur de la Gendarmerie nationale, désigné par le ministre en charge de la Défense, un (1) magistrat de Cour d’appel, désigné par le ministre de la Justice. Bien qu’ils soient déjà assermentés,il est prévu un autre serment pour renforcer leur indépendance. Il serait intéressant de préciser que les députés sont désignés l’un par la Majorité et l’autre par l’Opposition.

Pourquoi cette loi maintenant dans ce contexte de crise sanitaire de Covid-19 ?

Cette loi est en gestation depuis quatre ans. Elle s’avère une nécessité au regard du contexte sécuritaire dégradé dans lequel nous évoluons. Bien avant le Coronavirus, rappelez-vous des attaques djihadistes meurtrières de Chinagoder et d’Inatès. Il faut savoir que les écoutes téléphoniques, par exemple, sont aussi vieilles que les

Etats. Le projet de loi vise simplement à adapter les choses au contexte du moment. Et c’est la première fois, dans notre pays,qu’une loi va régir les écoutes. Ils’agit clairement de se conformer à l’article 29 de la Constitution qui dispose : « Le secret de la correspondance et des communications est inviolable. Il ne peut y être dérogé que dans les conditions et les formes définies par la loi, sous peine de sanctions ».

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